En tant qu’amateur je ne peux pas me permettre de posséder tous les échantillonnages de type de vis dans les diamètres que j’utilise le plus souvent, du D=2mm au D=6mm. Jusqu’à présent raccourcir une vis trop longue était, pour moi, une sorte de punition malgré l’utilisation de combines plus ou moins valables glanées çà et là sur les forums. Cela est resté vrai jusqu’à ce que je découvre que c’était une pratique courante chez les horlogers amateurs et qu’il existait un outillage pour y parvenir.

 J’ai repris l’idée de cet outillage pour mes besoins et le résultat est satisfaisant. C’est ce que je décris dans ce court mémo.

   

Voici l’éclaté de l’outillage.

Pour réaliser cet outillage j’ai utilisé des rebuts qui traînaient dans une caisse depuis belle lurette.
Compte tenu de mes besoins, vis de D=2 à 6mm pour l’essentiel, je suis parti d’un bout de tige filetée de M20x2.5 et d’un écrou lui correspondant.
Les tiges filetées et écrous destinés au grand public ont des tolérance très larges. La concentricité est médiocre mais pour le travail à venir cela suffit.
Compter environ 2-3 heures à partir des bruts et moins de 1/4 d’heure pour un canon porte-vis à partir d’un rond D=16mm.

Notes d’atelier

Mandrin fileté

Prendre la chute de tige filetée au mandrin trois mors. Pour avoir une prise solide et ne pas endommager le filetage enfiler un morceau de tube cuivre de plomberie en 20-22mm refendu à la scie et enfilé sur le filetage. Pour avoir un serrage puissant et un bon centrage il aurait mieux valu installer un mandrin 4 mors, mais j’avais la flemme…
Le noyau d’un vis M20x2.5 a un diamètre théorique de D=16,9 mm. Par chariotage on descend au diamètre D=16mm ou un peu inférieur. Cela permet une reprise en pince ER25mm. On dresse la face, on ébavure par un outil à chanfreiner à 45°. Ensuite on élimine les traces d’outil à la lime sur le tour. En effet les aciers utilisés pour ces tiges filetées sont assez ductiles et ne laissent pas un bel usinage.

 

Ecrou porte canon

Prendre l’écrou au trois mors. Dresser la face. A l’aide d’un outil à aléser lamer l’entrée de l’écrou sur 2 .5 mm de profondeur ce qui correspond d’ailleurs au pas de la vis. Le lamage centre la plaque d’appui en attente de la soudure sur l’écrou.

 

Vue de l’écrou avec son lamage

La plaque avant est tirée dans du rond pris au mandrin 3 mors. Une fois tronçonnée elle sera soudée à l’étain sur l’écrou précédemment préparé. J’utilise de la pâte à étamer qu’il faut penser à bien mélanger avant utilisation.

 

   

Pourquoi une soudure à l’étain ? Le joint brasé à l’étain est très solide, il peut être défait et refait un bon nombre de fois. La jonction est instantanée. Cela prend 3 à 4 mn tout compris. La Loctite n’est pas très adaptée pour ce type d’assemblage et impose des tolérances de jeu précises pour être au maximum de ses capacités. Il y a un temps de polymérisation minimal en fonction de la température. Et pour séparer les pièces il faut les chauffer à la torche vers 140-160°C, pratiquement de la soudure à l’étain. Quant à la Superglue des magasins de bricolage cela fait maintenant un bon moment que je ne l’utilise plus car elle a une mauvaise tenue aux vibrations et perd ses qualités dès 60 à 70°C. Enfin pour décoller les pièces il faut les chauffer et les vapeurs sont toxiques.

On monte l’ensemble sur le mandrin fileté de façon à conserver un semblant de concentricité. On serre fermement mais sans excès non plus car sinon le joint étain va céder.

On reprend au 3 mors. On dresse la face, on ébavure par un léger chanfrein. Après empreinte avec le foret à centrer on perce progressivement D5, 10, 12, 13mm. Ne pas se préoccuper de l’attaque du mandrin fileté par les forets.
Démonter l’écrou sans démonter le mandrin fileté.
Dresser la face du mandrin fileté jusqu’à effacer les traces laissées par les forets. Ebavurer par un chanfrein franc pour que le filetage s’engage bien sur l’écrou. Faire une petite marque au foret à centrer, elle servira de repère.
Remonter l’écrou, serrer fermement mais sans excès. Tracer au compas le cercle de D=23,6. Sortir l’ensemble du mandrin 3 mors.
Remonter l’écrou à l’envers sur le 3 mors et faire le lamage D=16mm sur 2mm de profondeur pour insérer le canon porte vis.
Sur la coupe ci-après on voit le canon porte-vis inséré dans le lamage de l’écrou.

   

Vue du lamage intérieur avec le canon porte vis en place

 Ensuite monter sur pince ER25 sur un porte écrou hexagonal comme ceux de la photo qui suit.

 

Tracer les centres des cercles en s’aidant d’un réglet aligné sur deux arêtes. Monter sur fraiseuse comme indiqué sur la photo. Pointer proprement au foret à center le premier centre, puis les deux autres centres. C’est normal qu’il y ait des décalages des centres avec le tracé car ce dernier a été réalisé au visuel avec un réglet. Ce tracé est là pour éviter les grosses bourdes. Percer à D=2 sur 14 mm environ. Souffler énergiquement à l’air comprimé dans les trous. Tarauder à M2,5 jusqu’au refus. Comme il s’agit d’un taraudage borgne et que les tarauds à main poussent les copeaux dans les rainures et vers l’avant il ne faut pas hésiter à sortir fréquemment le taraud le nettoyer et souffler dans le trou à l’air comprimé. Pour exécuter le chanfrein percer à D=4.7mm en s’assurant que la tête de la vis est noyée de 0,5 à 0,7mm en dessous de la face de la plaque.

 

L’ensemble terminé. Il ne reste plus qu’à mettre en place les vis M2.5x10 à tête fraisée.

Fabrication du canon porte-vis

On part d’un rond D=16mm. Idéalement on le montera en pince ER25 sur le tour car lors du retournement pour finir l’usinage, comme la pièce est petite la prise sur mandrin 3 mors n’est pas très bonne.
Dressage de la face avant, descente du diamètre à D=13mm. Perçage. Ebavurage par chanfreins.

 

Retournement avec prise en pince. Dressage de la face arrière avec mise à l’épaisseur. Lamage pour la tête de vis. Taraudage. Pour une vis à tête fraisée on utilisera un simple forêt ou un outil à chanfreiner. Pour les autres vis on utilisera une fraise pour rendre plat le fond du lamage.

 

Vue arrière avec le lamage qui sert de logement à la tête de vis.

  • Le lamage doit être un peu moins profond que la hauteur de la tête de vis car le noyau du mandrin fileté doit prendre appui sur la tête de vis pour l’immobiliser efficacement.
  • Dans le cas ou le nez du canon est très court car la vis doit être très petite, on le fait d’une longueur suffisante pour permettre la reprise en pinces ER lors du retournement. Ensuite on monte une vis. On assemble le tout avec l’écrou et on tronçonne en laissant un peu de sur-longueur pour assurer le dressage du nez du canon à la bonne cote.
  • Si il y a une petite série à faire il vaudra mieux prendre de l’acier trempable, dit acier à outillage. On effectuera une trempe à l’huile avec un revenu couleur jaune paille. Compte tenu de la petite taille de la pièce, un simple torche butane un peu grosse et quelques briques en guide de foyer font l’affaire.
  • On peut faire d’avance des ébauches de canons d’une longueur standard et les retailler le moment venu. Ce ne sont ni plus ni moins que des bagues percées au diamètre de taraudage.

On trouve facilement sur Internet des extraits de tables de dimensions standard comme en témoigne ci dessus les vis CHC de classe 8,8. Cela permet de préparer des ébauches d’avance.

 

http://www.clickspringprojects.com/screwhead-holding-tool.html#

 On voit ci-après une réalisation très soignée de l’internaute Clickspring.

 

Annexes

Plans du mandrin de reprise vis : ICI

Sources:

https://www.sandvik.coromant.com/sitecollectiondocuments/downloads/global/technical%20guides/fr-fr/c-2920-031.pdf

http://joho.p.free.fr/EC/COURS%20DOC/FILETAGE/Construction/FILETAGE%20METRIQUE%20ISO.pdf

 Texte et dessin : Patrick LECLERE

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